Initiation à la photo argentique

La photographie argentique revient à la mode, c'est incontestable. Délire d'hipster élitiste ou véritable plaisir photographique, j'ai voulu comprendre ce phénomène. L'usage d'une pellicule peut-t'il m'aider dans ma pratique de la photographie ? À l'aide d'un appareil offert par mes parents et restauré par les mains expertes d'Arthur, je me suis lancé dans cette aventure analogique.
Quel appareil ?
Il y a beaucoup de manières de se lancer dans la photographie argentique. On retrouve partout les très populaires appareils instantanés Instax Mini de Fujifilm, les Polaroid de la marque éponyme et on commence à voir réapparaitre les Kodak jetables dans les rayons de la Fnac. Mais si vous voulez vous faire plaisir avec un bel appareil photo, je vous conseille de vous orienter vers les Compact (Point and shoot) et les Reflex (SLR) de l'époque.

Pour ma part j'ai en ma possession un Olympus OM2n. Ce reflex japonais sorti en 1979 est compatible avec les pellicules 135mm (35mm 24x36) et la célèbre monture OM pour les objectifs. Cet appareil n'a pas connu la hype du Canon AE, son rapport qualité/prix en fait donc un bon appareil pour un amateur averti qui veut se lancer dans l'aventure argentique. On en retrouve en bon état sur leboncoin ou ebay entre 80 et 200€ avec une optique. J'aime beaucoup le style de cet appareil qui se marie très bien avec mes Fujifilm X-T20 et X-T30.

Quelle pellicule ?
Choisir une pellicule n'est pas une mince affaire, Fujifilm, Kodak, Afga et les autres proposent une large gamme de film 35mm qui possèdent toutes des rendus de couleur différents. Couleur ou Noir&Blanc, à vous de choisir. Personnellement j'ai beaucoup aimé la Kodak Gold. Le paramètre à prendre en compte dès le début est la sensibilité ISO.
La sensibilité ISO est la sensibilité à la lumière. De manière très simplifiée, plus la sensibilité est élevée, plus les "grains d'argent" seront gros et captureront de la lumière, mais plus ils seront visibles.

Même si le grain numérique n'est pas 100% identique au grain argentique, vous pouvez voir sur l'image ci-dessous que le grain est nettement plus visible à 3200 ISO qu'à 400 ISO.


Pour commencer, la 400 ISO saura s'adapter à beaucoup de situations, en été en extérieur préferez la 200 ISO, pour de la faible luminosité il vaudra mieux se tourner vers de la 800 mais attention au grain !
Le processus photographique
En théorie, c'est comme un appareil numérique : on allume l'appareil, on vise, on effectue la mise au point, la vitesse et l'ouverture, et on déclenche. Selon les appareils la mise au point, la vitesse et l'ouverture sont même automatique !
En pratique, on réfléchit bien plus à notre photo, car contrairement au numérique, il est impossible de voir le résultat de sa photo directement après la prise de vue (sauf si vous utilisez un appareil instantanné comme les Instax ou Polaroid). Comme il est hors de question de faire 8 photos et se dire "on verra bien", on réfléchit beaucoup plus à la composition et l'éclairage de la scène, et on apprend à faire des concessions :
Les photos ne seront pas parfaites, il n'y en aura peut-être que une ou deux, elles seront peut-être légèrement mal exposées ou un peu floues, mais elles marquent un moment, un souvenir.
Pour voir votre photo, il va falloir la développer (vous même ou via un labo) et la scanner ou la tirer. Le développement de la photo consiste à baigner la pellicule dans un bain chimique pour "fixer" les images et rendre la pellicule insensible à la lumière, pour ensuite scanner puis tirer les photos.
Je peux vous conseiller cette excellente vidéo de Smarter Everyday qui détaille le processus complet en anglais et en 30mn d'un développement.
Le rendu
1er film
Ma toute première pellicule est loin d'être parfaite avec quelques photos sur-exposées et quelques déclenchements non désirés 😅 Comme il faut attendre plusieurs jours (ou semaines selon le temps que vous dure le film) pour voir le résultat, c'est assez difficile de savoir si vous utilisez bien l'appareil, si les réglages sont bon etc.
2ème film
Après avoir prit le temps d'analyser les photos du premier film, j'ai pu corriger quelques défauts :
J'ai un objectif 50mm f/1.4, une très grande ouverture donc, mais la vitesse de l'appareil est limitée à 1/1000 de seconde. Contrairement à mon Fuji X-T30 à ISO variable qui est capable de monter à 1/4000 de seconde, j'étais souvent sur-exposé. J'ai l'habitude de faire des portraits cadrés serrés et à pleine ouverture, les photos sont très belles mais manquent de vie :
Avoir toujours la plus grande ouverture pour avoir un beau "bokeh" n'est pas une fin en soit. Cadrer moins serré et avec une plus grande profondeur de champ aide à donner du contexte aux photos









Argentique VS Numérique
C'est indéniable, les photos argentiques ont un charme inné, pas besoin de passer des heures à faire du post-traitement. Bien sûr, des filtres Lightroom permettent d'obtenir le même résultat avec des .jpg numériques mais il faut avouer que ça n'a pas la même saveur. Voici 4 photos de l'Olympus OM2n + 50mm f/1.4 avec un film Kodak Gold 200 et du Fujifilm X-T30 + XF50mm f/2.




Où acheter ?
Aujourd'hui on peut trouver des appareils d'occasion très facilement et à bon prix dans les vides-grenier, sur Leboncoin ou sur ebay. Avant d'acheter il faut bien se renseigner sur l'état de l'appareil : vérifier s'il est en bon état cosmétique est un bon réflexe, mais aussi s'il déclenche bien, si les mousses ne sont pas détériorées, s'il n'y a pas de moisissures génantes dans l'objectifs...
Il est aussi possible de passer par un professionnel qui ne vend que des appareils restaurés et fonctionnels. Personnellement je ferai confiance à Benber qui possède sa boutique (en fermeture estivale au moment de la sortie de cet article) et met sur son blog un argus de l'argentique. Ses prix sont corrects et j'apprécie son honneteté et son intégrité.
Où developper ?
De nombreux labos photos physique ou en ligne proposent encore leurs services de développement de films. Moyennant finance, ces artisants de la photographie développent les pellicules et impriment et scannent les photos.
Le verdict : effet de mode ?
La photographie argentique est bien plus exigeante que la photo numérique au smartphone ou au reflex, mais force est de constater que j'ai plus appris en quelques photos avec mon vieil Olympus que ces derniers temps avec mon Fujifilm hors de prix. Je ne suis pas assez "vieux" pour avoir utilisé des films et je ne suis pas sensible à la nostalgie et au vintage, mais je dois bien admettre que j'éprouve un réel plaisir à utiliser cet appareil.
J'ai réappris à faire de la photo, à faire des photos qui me plaisent à moi, pas parce qu'elles sont tape-à-l'oeil mais parce qu'elles me parlent et racontent une histoire. Une photo est un souvenir, elle peut être imparfaite, et l'argentique laisse encore plus de place à l'aléatoire. Parce qu'il est impossible de la partager sur le moment (sur Instagram ou autre), j'ai réappris à apprécier la photo lorsqu'elle arrive dans ma boite mail pour les fichiers .jpg et dans ma boite aux lettres pour les tirages papier.
L'argentique ne m'a pas réellement appris, mais réappris. Je doit bien avouer que je n'aurai pas cru arriver à cette conclusion la mais : Non, l'argentique n'est pas un effet de mode mais un véritable outil pour s'améliorer en photo, et pour comprendre le véritable but d'une photo : graver un moment.
Quoi qu'il en soit, pas d'inquiétude, car que vous soyez amateur ou confirmé, que vous soyez plutôt carte SD ou film, que vous gagniez de l'argent avec vos photos ou que vous graviez des souvenirs de famille, il ne faut pas se prendre la tête, car comme le dit si bien l'ami Adrien : "La photo c'est super facile".
À bientôt pour un prochain article !